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jeudi 29 septembre 2016

L’histoire de la formation de diaspora azerbaïdjanaise

L’histoire de la formation de diaspora azerbaïdjanaise

Durant 200 ans, la formation de la diaspora azerbaïdjanaise sétait faite essentiellement par les citoyens de trois pays différents : Azerbaïdjan du Nord et Sud et la Turquie. Les Azerbaïdjanais constituent le peuple turcophone azéri vivant en République d'Azerbaïdjan, en Iran, en Géorgie, et dans la Fédération de la Russie. Les statistiques sur le nombre des Azerbaïdjanais ont été calculées sur la base du rapport de l'UNESCO, le Comité d'État pour la Coopération avec les Azerbaïdjanais à l’Étranger, l'information des ambassades dans les pays étrangers et le Congrès des Azerbaïdjanais du monde. finir le nombre exact est très difficile[1]. Tout d’abord, il faut signaler que la géographie de la diaspora azerbaïdjanaise et la détermination de son nombre ne sont pas faites. Aujourdhui, sans avoir la statistique concrète nous ne pouvons pas parler des chiffres. Cependant, dans son discours le président Ilham Aliyev remarquait : je suis le président de 50 millions dAzerbaïdjanais[2]. Par contre, ce manque d'historique est lié aux événements sociopolitiques. Par exemple, après la conquête du Caucase par les Russes, jusqu’au début du XXe siècle, sur la carte didentité des Azerbaïdjanais écrivait « identité russe ». Malheureusement, pendant la période soviétique, elle est devenue « nationalité soviétique ». Outre cela, pendant une longue période les Azerbaïdjanais vivant en Iran, en Turquie, en Géorgie et en Russie sont considérés comme tatar, azéri, turc qui a aussi rendu le compte difficile (Aliyev, 2005 : 82).
Bayram Balci définit deux notions différentes les Azéris et les Azerbaïdjanais qui se retrouvent éparpillées dans plusieurs pays du monde. Il souligne : certaines de ces populations sont originaires du territoire de lactuel Azerbaïdjan, d’autres ont une parenethnique ou linguistique avec les Azerbaïdjanais, dautres encore, à peine conscients de leur proximité ethnique ou linguistique avec les Azerbaïdjanais daujourd’hui, sont perdus comme des co-ethniques par les autorités Azerbaïdjanaises postsoviétiques (Balci, 2008:187). Selon l’auteur, les communautés azerbaïdjanaises dIran, de Turquie, de Russie et de lEurope, en raison de leurs sociopolitiques nont pas un rapport particulier envers leur origine. Aujourdhui, la République dAzerbaïdjan ne peut donc pas véritablement s’appuyer sur cette diaspora et la Russie est le seul pays elle dispose dune diaspora importante, avec environ un million de personnes (plus de deux millions selon d’autres estimations). À lexception dune petite communauté en Turquie et en Géorgie, seule la diaspora azerbaïdjanaise de Russie semble faire preuve de dynamisme et offrir une certaine visibilité à son pays d'origine.
La population de langue et de culture azerbaïdjanaise dépasse largement le cadre de l'Azerbaïdjan, puisqu'elle représente 35-40 millions de personnes, principalement installées en Asie occidentale. La plus grande communauté est iranienne, essentiellement groupée au Nord, dans la région de Tabriz. Elle compte environ 20 millions de personnes, soit près de deux fois et demi de la population de l'Azerbaïdjan[3]. Lors du deuxième Congrès sur la diaspora azerbaïdjanaise dans le monde à Bakou (16 mars 2006), le président Aliyev affirme que le nombre d’azerbaïdjanais dans le monde est de 50 millions dont 30 millions vivent en Iran. A. Yunusov écrit qu’aps ce discours, le 25 mars 2006, l’ambassadeur iranien dAzerbaïdjan soulignait dans son interview quen réalité dans son pays vit plus de 35 millions d'Azerbaïdjanais (Yunusov, 2009 : 147). Aujourdhui, ces Azerbaïdjanais vivent dans 70, pays y compris la République d’Azerbaïdjan. Les Azerbaïdjanais habitant en Iran, en Géorgie, en Fédération de Russie, devenus des citoyens étrangers au cours de certains événements historiques spécifiques résultants de la délimitation des frontières, ne sont pas considérés comme appartenant à la diaspora. LArménie est exclue de cette liste, car durant le conflit du Karabakh les Azerbaïdjanais ont échassés de leur terre. En 1998, le Comité dÉtat Statistique d’Azerbaïdjan dénombrait 204 667 réfugiés du Karabakh entre 1987 et 1994, dont 201 000 Azerbaïdjanais, 2 359 Kurdes et 1 239 Russes (Yunusov, 2009 : 26).
En Azerbaïdjan, la notion de diaspora est récente, mais le processus de l’émigration et de l’installation dans différents pays du monde est ancien. Aujourd’hui, la loi sur « La politique de lÉtat à légard des Azerbaïdjanais vivant à l’étranger » stipule que : les citoyens de la République dAzerbaïdjan et leurs enfants qui vivent en dehors de la République, les anciens citoyens de la République soviétique dAzerbaïdjan ou de la République dAzerbaïdjan vivant à l’étranger et leurs enfants, et les individus qui se rattachent à lAzerbaïdjan pour des raisons ethniques, linguistiques, culturelles ou historiques (le Comité dÉtat pour la Coopération avec les Azerbaïdjanais du Monde).
LEncyclopédie Nationale d’Azerbaïdjan (2007) présente la notion de diaspora azerbaïdjanaise ainsi : les personnes ayant des raisons économiques, sociopolitiques particulières, sociales et autres, victimes d’émigration forcée ou volontaire de leur territoire dorigine, vivant à létranger, gardant et développant leurs appartenances nationales et culturelles conservant toujours un lien avec le pays dorigine, ainsi quayant des rapports linguistiques et des valeurs religieuses, représente la diaspora azerbaïdjanaise (Azərbaycan Milli Ensiklopediyası, 2007).
Selon sa formation historique, la diaspora azerbaïdjanaise a connu quelques étapes (lixanlı, 2007) :
1) La première étape commence à la fin du VIIème et au début du VIIIème siècle avec loccupation des Arabes. Avant cette date, il ny a pas de recherches sur la diaspora azerbaïdjanaise. On suppose que jusqu’à cette époque il y a eu une légère émigration azerbaïdjanaise en Asie et en Europe. L’installation dune autre langue, culture et religion a causé le départ au Proche et Moyen-Orient surtout à la Mecque. Cependant, l'arrivée des conquérants arabes qui s’opéra lors de l'expansion de l'islam au milieu du VIIème siècle a provoqué lémigration des zoroastriens en Inde et en Chine. Les auteurs Ibn Kutba (« Kitab- echècherve chuera ») et Aboulfaradj Isfahani (« Kitab el-aghani ») dans leurs œuvres montrent l’existence des poètes azerbaïdjanais à Médine, parmi eux, Musa Chahabat, Ismayil ibn Yesar, Abdoulhasan Keskhani, Khatib Tebrizi, Ebu Omar Osman Sefbendi, Ebuhefiz Omar ibn Ali Zendjani pour ne citer que les plus célèbres (Rizvan, 2002).
2) La suite de la première période a débuté avec la renaissance en Orient. À cette période, lAzerbaïdjan a des relations culturelles avec lEurope et lAsie. Sous loccupation de Tamerlan (Timur le Boiteux 1136-1405) et la Horde dOr, la plupart des villes azerbaïdjanaises ont été détruites et les artisans, les artistes ont édéportés vers lAsie centrale. Cette étape a continué jusqu’au XIXème siècle nous avons assisté à une forte émigration des savants et des étudiants vers le Proche et Moyen-Orient. Xatib Tabrizi (XIème s.), Nesreddin Tusi (1201-1274), Chefieddin Urmevi (XIIIème s.), Ebdürrechid Bakuvi (XIVème et XVème s.), Oruc bey Bayat (1560-1604), Hadji Zeynalabdin Chirvani (1780- 1838), etc., sont des personnes célèbres à létranger[4].
3) La formation de la troisième période de la diaspora azerbaïdjanaise commence après la conquête du Caucase par la Russie. Ici, nous pouvons parler de lémigration systématique liée aux événements politico-militaires et la guerre russo-persane. Le développement de la culture et du sentiment de la conscience nationale a é détruit. La Guerre du Caucase durera 70 ans, entre 1802 à 1872. Si jusqu’à cette période il existait une tendance vers lOrient, à partir du XIXème siècle elle change pour l’Occident. Dans certaines villes de Russie comme Kazan et Saint-Pétersbourg les langues turques commencèrent à être étudiées et enseignées. À cette époque, lémigration ne se faisait pas seulement vers la Russie, mais aussi vers lEmpire ottoman ou lIran. Les noms de personnages célèbres comme Mirze Kazimbey, Mirze Djafar Toptchubachov, Mirze Ebuturab Vezirov, Abasgulu agha Bakikhanov, Ismail  bey Goutgachinli, Mirze Feteli Akhoundov, etc. signent l’apparition de la nouvelle génération d'intellectuels. Khaleddin Ibrahimli (1996) dans Azərbaycan Siyasi Mühacirəti 1918 1991 présente quelques périodes de loccupation russe :
a) La première période débute avec le traité du Gulistan, mais n’entraîne pas une forte émigration. Les khanats azerbaïdjanais essayent detablir leurs pouvoirs.
b) Après le traité de Turkmentchay la Russie consolide sa position au Caucase. Une nouvelle période commence pour le peuple divisé en deux obligeant des milliers de gens à l'émigration.
c) Les guerres de Crimée (1853-1856) et russo-turques (1877-1878) posent une nouvelle difficulté pour les Azerbaïdjanais qui essayent dorganiser une diaspora en Turquie, en Iran et en Europe.
d) Dans cette période, lauteur englobe les événements qui se passent entre 1908-1918. Durant cette période, des émigrants comme E. Houseynzade, M. E. Rasoulzade, A. Ağaoğlu commencent leurs activités diasporiques en créant différentes publications en Turquie, en Iran, en Russie et en Europe.
4) Au début du XXe siècle, l’émigration des Azerbaïdjanais prend un caractère intensif et cause une forte émigration des intellectuels. La quatrième étape couvrant toute la période du XXe siècle se résume en quelques périodes:
a) Avec les révolutions dans la région: la Russie 1905-1907, la collision arméno-azerbaïdjanaise 1905, la révolution en Iran (Sattar Khan) 1908, la révolution en Turquie et les Jeunes Turcs 1908.
b) Avec la Première Guerre mondiale 1914-1918 et leffondrement de la République Démocratique d’Azerbaïdjan (1918-1920).
c) Avec la Deuxième Guerre mondiale 1939-1945 et la révolte de 1945 en Iran (Seyyed Jafar Pishevari).
d) Avec la révolution iranienne de 1979.
e) Avec l'effondrement de l’URSS et l’apparition d'une nouvelle diaspora.
La première communauté nationale à l’étranger est apparue aps la Deuxième Guerre mondiale. En 1949, l’Association Culturelle Azerbaïdjanaise fondée par M. E. Rasoulzade fait le premier pas dans l’organisation de la diaspora. Une autre « Association Azerbaïdjan-Amérique » est créée en 1958 au New Jersey. À cette période, les réalités politiques du problème avec la diaspora empêchaient de bâtir lidéologie nationale pour construire une forte communauté. En 1946, est créé la Socié d'Amitiés et de Relations Culturelles dAzerbaïdjan avec les pays étrangers. À partir de 1960, celle-ci a commencé à publier le journal Vətən səsi (la voix du Patrie) qui sera remplacé en 1982 par Odlar Yurdu (Terre du feu)[5]. Entre 1974 et 1975, l’association réussit à organiser des journées de la culture azerbaïdjanaise en France, en Italie, au Danemark (Tahirli, 2001). Par contre, nous signalons qu’en général, la communauté azerbaïdjanaise à l’étranger navait pas de liens directs avec cette association et cela s’explique par la dure du système soviétique.
Vers la fin des années 1980, le chef de l’association Vətən, Eltchin Efendiyev joua un rôle exceptionnel dans la création des relations entre la diaspora et la patrie ainsi qu’entre les savants comme Tadeusz Swietochowski, Ehmed Chimide, Audrey L. Altstadt, etc. Entre 1986-1992, l’association réussit à fonder une cinquantaine de clubs, cercles, amicales et comités à létranger. Avec l’influence de la tragédie sanglante commise par les troupes soviétiques à Bakou le 20 janvier 1990 (Janvier Noir) 120 associations ont été créées dans plus de 30 pays pour exprimer leurs protestations contre cet acte atroce (Tahirli 2007).
Bibliographie
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2.       Altstadt Audrey L. (1992) The Azerbaijani Turks: Power and Identity under Russian, Rule, Hoover Institution. Stanford University, Studies of Nationalities in the USSR Series.
3.        ArzumanliI Vagif (2001) Azerbaycan Diasporu (Diaspora d’Azerbadjan), BakouQartal.
4.      Asgarov Vazeh (2014) L’immigration des Azerbaïdjanais, Saarbrücken, PAF.
5.       Balçi Bayram (2008), La place de la « diaspora » azerbaïdjanaise dans la politique de l'Azerbaïdjan postsoviétique : esquisse d'analyse, EurOrient, 28, pp. 185-204.
6. БУГАЙ Николай (2004), Депортация народов (Déportation des peuples), in: Война и общество (BOUGAY Nikolay, La guerre et la société), 1941-1945, МоскваНаука.
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10.   ДOЛГИХ Елена Ивановна (2001) Эмиграция из России (DOLGUIKH Elena Ivonova, L’émigration de la Russie), интернет-журнал "ПОЛЕМИКА", 2001, №9.
11.   Hadjibeyli Timoutchine (1988) Le question du Haut Karabagh. Un point de vue azerbaïdjanais,  Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée, N°48-49, 1988. Le monde musulman à l’épreuve de la frontière. pp.281-290, source : http://www.persee.fr
12.   İbrahimli Xaleddin (1996), La politique d’immigration d’Azerbaïdjan, (1918 - 1991), Bakou, Elm.
13.   LOIKO Sergei (2001), Russians are leaving the country in droves, Los Angeles Times, 14. 11. 2011.
14.   Rizvan Nazim (2002), D’histoire de la diaspora d’Azerbaïdjan, Bakou, Borçalı HPM.
15.   Tahirli Abid (2001), L’immigartion d’Azerbaïdjan, Bakou, Tural-Ə.
16.   Tahirli Abid (2007), La littérature azerbaïdjanaise à l’émigration (1921-1991), Bakou, Çinar Çap.
17.   Sadykova Bakhyt (2007) Mustafa Tchokay dans le mouvement prométhéen, Paris, IFEAC – Harmattan.
18.   Valikhanli Naila (2007), L’histoire d’Azerbaïdjan IIème volume, Bakou, Elm.
19.   Vichnevski Anatoli, Zayontchkovskaia Jeanne (1991), L'émigration de l'ex-Union soviétique : prémices et inconnues, in : Revue européenne de migrations internationales, vol. 7 N° 3, p. 41-66.


Dr. Vazeh ASGAROV




[1] Selon le Congrès des Azerbaïdjanais du Monde, le nombre des Azerbaïdjanais vivant dans 67 pays a dépassé 50 millions
[2] Journal  Azerbaïdjan, 17 mars 2006
[3]Azerbaïdjan : présentation générale, 31 juillet 2008. Source:  www.colisee.org.
[4] Oruc bey Bayat (1560-1604) est un historien et diplomate dorigine azerbaïdjanais. Il est arrivé en Espagne en tant quambassadeur de lÉtat séfevide et après sa mission a décidé de rester à Madrid. Après s'être converti au christianisme, il est appelé Iran Don Juan. La reine de l'Espagne Margarita devient sa marraine. Le livre « Fars Don Juan » (1603) reste le premier livre publié en Espagne et en Europe par un auteur azerbaïdjanais.
[5] Le journal Odlar yurdu (Terre du feu) publiait en langue azerbaïdjanaise en caractères cyrilliques, latins et arabes et envoyait aux associations azerbaïdjanaise à létranger.

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