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lundi 4 mai 2015

Ali Mardan bey Toptchibachi

         À différentes périodes de l’histoire du début du XXème siècle, le mouvement national azerbaïdjanais recherche à développer la démocratie. La vie d'Ali Mardan Toptchibachi (1859-1934) se situe exactement à l'époque de la naissance et du développement du djadidisme, du panturquisme et du nationalisme. Ali Mardan bey, né en 1859 à Tbilissi, est scolarisé en 1865 dans un gymnase de sa ville natale et continue ses études entre 1884-1888 en histoire et philologie à l'Université de Saint-Pétersbourg1. Après l’Université, le conseil scientifique du département de la faculté de Droit décida de lui proposer un poste de professeur. Cependant, la loi impériale de 1888 n’autorisait pas le travail des non-chrétiens à l’Université, ce qui lui amène à rentrer à Bakou. Entre 1897 et 1917, il fut l’un des organisateurs et rédacteurs du journal Kaspi. Devenu l'un des premiers fondateurs de réforme intellectuelle des musulmans et dirigeant du mouvement sociopolitique de la Russie tsariste, A. M. Toptchibachi sera en août 1905 parmi les organisateurs du Ièr Congrès des musulmans de Russie à Nizhniy Novgorod. En 1906, il est aussi parmi les leaders du premier parti politique dit « Union des musulmans de la Russie » (Ittifagi-Muslimin). En tant que membre de la Ire Douma d’État, il signe en juillet 1906 le « Manifeste de Viborg » et sera condamné à trois mois de prison2.
        L’activité politique d’Ali Mardan bey se développe pendant les révolutions de Février et Octobre 1917. En 1918, il fut l'un des fondateurs de l'indépendance de l’Azerbaïdjan et ne put rester que trois mois au pays. D’abord il devint ministre sans portefeuille à Gandja, ensuite ambassadeur azerbaïdjanais en Géorgie et en Turquie. Le 28 décembre 1918, il fut élu par le parlement de l'Azerbaïdjan comme chef de la délégation sur la conférence de la paix de Versailles. Arrivant à Paris en mai 1919, Ali Mardan bey mène une activité dynamique en publiant 12 bulletins d’informations et plusieurs articles dans la presse française. Après huit mois de travail, le 12 janvier 1920, l’indépendance de l’Azerbaïdjan fut reconnue de facto. A. M. Toptchibachi eut un rôle exceptionnel dans la maintenance de l’indépendance de l’Azerbaïdjan durant les 23 mois de son existence. Avec la chute de la République Démocratique d’Azerbaïdjan, la vie diplomatique de Toptchibachi, comme celle du reste de la délégation, change et il connaît une nouvelle vie - émigrée. Le reste des 14 ans de sa vie, il vécut en exil en France avec beaucoup de difficultés. Il garda ses responsabilités malgré toutes les difficultés financières et resta l’un des leaders de l'émigration politique des années vingt et trente, continuant son combat jusqu’à la mort pour la liberté et les droits de son peuple ainsi que pour l’indépendance de son pays.



         Entre 1920 et 1934, A. M. Toptchibachi vécut à Paris et continue ses activités politiques avec la publication d’un livre sur des hommes littéraires, d’articles dans les journaux et des magazines sur l'histoire, la géographie, la littérature ainsi que sur la création de la RDA. À la question de savoir pourquoi Ali Mardan bey choisit Paris alors que la plupart des migrants politiques ainsi que les leaders de la RDA s’installaient en Turquie, R. Aboutabilov explique que Paris pouvait être choisie comme une ville de résidence pour deux raisons, premièrement la possibilité de continuer les pourparlers avec les dirigeants des grandes puissances sur l’indépendance de l’Azerbaïdjan et deuxièmement, Toptchibachi était toujours pour l’unification et l’indépendance du Caucase or, Paris rassemblait tous les anciens gouvernants de l’Arménie, de la Géorgie et du Caucase du Nord. Les efforts d’Ali Mardan bey ne seront pas inutiles : le 10 juin 1921 fut signée la déclaration de l’Union des Républiques du Caucase. Quatorze ans après, un autre document se met en place le pacte de la Confédération Caucasienne (Aboutabilov, 2006 : 46).



      R. Aboutabilov (2006), cite aussi quelques lettres d’A. M. Toptchibachi adressée à Dj. Hadjibeyli en montrant les difficultés financières de ce grand homme politique. Nous en présentons quelques-unes :
    Notre situation matérielle est mauvaise : 100 francs reçus à titre de prêt de la délégation de Géorgie sont déjà dépensés. Nous pouvons à peine vivre le mois de février, après c’est un scandale. 29 janvier 1920

     J’ai reçu votre lettre, dans laquelle vous me demandez une aide financière. Ni moi, ni la caisse de la délégation ne possédons plus d’argent… 30 juillet 1928

  L'humeur, particulièrement liée avec les événements de derniers jours est affreuse. Les dettes sont augmentées, il y a le froid et l’absence complète des ressources… 14mai 1932 (Aboutabilov, 2006 : 50).

     Ali Mardan bey a décédé le 5 novembre 1934 dans la région parisienne, à Saint-Denis, et est enterré dans le cimetière de Saint-Cloud. Une partie des descendants d'Ali Mardan Toptchibachi est restée en France tandis que l'autre partie vit actuellement en Turquie. Dans la délégation envoyée à Paris, il y avait le fils d’Ali Mardan bey, Alekber bey Toptchibachi (1896-1977), qui a joué le rôle de secrétaire de la délégation. Le numéro 11 du journal Prométhée de 1934 consacra un numéro publication entière à Ali Mardan. La femme d’Ali Mardan bey, Peri Topchibachi (1973-1947) ainsi que ces deux fils Ali Akbey bey (1896-1977 et Rachid bey [1900-1926] sont enterrés dans le cimetière de Saint-Cloud (Aboutalibov, 2008).

    En 1997, pour la commémoration d’A. M. Toptchibachi, est apposée une plaque commémorative au numéro 37 de la rue Descamps de Paris où vécut le président du Parlement RDA pendant une période.



   1.   À l’époque de la Renaissance, dans l’enseignement scolaire sont apparues un certain nombre des nouvelles écoles humanitaires connues comme lycées, gymnase. La première école latine est établie en 1510 à Londres. En Allemagne, elle était construite en 1526 à Nuremberg. Elle est fondée en Russie (Moscou) seulement en 1703.
  2. « Le Manifeste de Vyborg » est signé le 9/10 juillet 1906 par un groupe de députés de la première Douma d'État pour protester contre la dissolution anticipée du Parlement. Sa préparation eut lieu à Vyborg, non loin de Saint-Pétersbourg.


VAZEH

in: Vazeh Asgarov, "Immigration Azerbaïdjanaise" (2013), PAF, p.425


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