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jeudi 29 septembre 2016

La naissance de l’émigration azerbaïdjanaise

La naissance de l’émigration azerbaïdjanaise
La situation de l’Azerbaïdjan au début du XXe siècle est bouleversée par les révolutions organisées à ce moment en Russie, en Iran et en Turquie. Ces trois événements présentent des caractéristiques comparables dans les étapes des révolutions et des contre-révolutions. Certains chercheurs azerbaïdjanais comme Eltchin, Aliheydar Atakichiyev, Mirza Bala Memmedzade sur le sujet de l’émigration azerbaïdjanaise montrent qu’elle a débuté exactement à cette période et a causé le départ des intellectuels et des élites. C’est à cette époque qu’émigrent Ali bey Huseynzade, Ahmed Aĝaoĝlu, Memmed Emin Rasoulzade, Nassib bey Yussifbeyli, Fuad bey Korpuzade. Leur première destination fut la Turquie ottomane. La première étape de l'émigration, a été «officiellement » datée du vingtième siècle, dans les années trente. Elle commença en avril 1920 tout de suite après la chute de la République Démocratique Azerbaïdjanaise (RDA). La grande majorité de la première vague d'émigrants était constituée par ceux qui, à cette époque-là, quittaient les frontières de l'Azerbaïdjan soviétique. L’émigration était légale dès lors que des parents vivaient à l'étranger et payaient en devises leur sortie du territoire soviétique. Le franchissement illégal de la frontière était la cause de grandes difficultés et de risques immenses. Plus tard, on a connu encore une forme de déportation. Par exemple, en 1938 on « expédia » tous les Azerbaïdjanais ayant des passeports iraniens en Iran (Ibrahimli, 1996).
L’émigration des Azerbaïdjanais du début du XXème siècle jusqu’à l’occupation de l’Armée rouge s'est déroulée en deux étapes. Dans la première étape commencée à la fin du XIXème siècle jusqu’au début du XXème siècle, on trouvait les personnes de différents domaines et professions ainsi que des intellectuels. Ali bey Husseynzadé, Ahmed Aĝaoĝlu, Memmed Emin Rasoulzade et beaucoup d’autres ont émigré en Turquie, en Iran et en Europe. L’une des raisons de l'émigration était la situation politique et économique. Par exemple, l’une des causes de l’émigration de plusieurs intellectuels azerbaïdjanais était liée au conflit arménien. Les guerres infinies et conflits interethniques poussaient les gens à émigrer. Les descendants des émigrés de cette période continuent à vivre en Turquie et dans les autres pays. Par exemple, le fils d’Ali bey Husseynzadé, le peintre Selim Turan (Paris) ou les enfants d’A. Ağaoğlu, Sureyya et Samed (Turquie), le fils de Djeyhun Hadjibeyli, Timurtchin Hadjibeyli (Paris) (Tahirli, 2001).
La deuxième génération d'émigrants a quitté le pays après la chute de la République Démocratique d’Azerbaïdjan. À cette période, beaucoup d’hommes politiques et de personnalités publiques de l'Azerbaïdjan étaient obligés d’émigrer. Les migrants comme Djeyhun Hadjibeyli, Ahmed Djaferoglu, Almas Ildirim, Mirze Bala Memmedzade, Memmed Emin Rasoulzade, Ali Merdan bey Toptchibachi se sont installé le plus souvent en Turquie, en France ou dans d'autres États européens. On peut mentionner ici les Azerbaïdjanais, qui après la désagrégation de la République Azerbaïdjanaise Démocratique, sont partis vers l'Iran.
La deuxième étape de l'émigration a été vécue principalement par d’anciens prisonniers de guerre non revenus dans le pays natal après 1945. Ils n’avaient plus le choix, particulièrement après que Staline ait annoncé : « les Vainqueurs jugent ». Parmi cette catégorie, il y avait ceux qui se sont battus bravement dans les rangs des Résistances française et italienne. Mais pendant l’époque soviétique, l’histoire de l’humanité a connu une autre sorte de migration sous les noms de Purges, Grande Terreur ou Terreur rouge stalinienne.
Au cours du XXème siècle, l'étude de la politique répressive en URSS a été menée sans utilisation des sources statistiques et des données des organismes internationaux. Ces documents étaient tenus strictement secrets, et donc inaccessibles. Justement, à la fin des années 1980, avec la mise en place d'une politique plus libérale en matière d'expression (glasnost) et la démocratisation, les chercheurs réussissent à accéder aux archives et à rendre publics les articles, auparavant interdits sur le sujet des prisonniers du goulag. Ces publications de statistiques ont donné de nouvelles forces vives pour une étude ultérieure féconde du problème. Par contre, personne ne peut donner de statistiques exactes sur les victimes du régime communiste en URSS pour la simple raison que les documents authentiques demeurent insuffisants, occultant certaines disparitions. En plus, sur les plaques commémoratives établies en l'honneur de ces citoyens, fusillées ou décédés dans les camps, l’information sur les conditions exactes de leur mort tragique reste absente. Il a été révélé et marqué les signes mémoriaux seulement sur une petite partie des tombeaux et des milliers de cimetières à côté des camps ont été perdus ou bien transformés en terrains vagues. À leur place, de nouveaux blocs d'habitations où des ensembles industriels ont été bâtis. Jusqu'ici, des millions de gens ne savent pas oùsont enterrés leurs parents, leurs grands-parents et leurs arrière-grands-parents.
Les chercheurs russes H. Q. Okhotin et A. B. Roguinsky donnent le chiffre d’environ 5,5 millions de personnes condamnées et exilées pour la seule période de 1921 à 1953. Ils divisent les catégories principales les plus massives des victimes des répressions politiques en URSS de l’époque stalinienne (Roguinsky, Okhotin, 2005).
La troisième étape de l’émigration s’est déroulée durant les années 1970 et 1980. La raison était la recherche d’un « autre monde ». L’émigration de l’URSS de la deuxième moitié du XXème siècle jusqu'à la fin des années 1970, était couverte par l'immigration. Il est apparu une période d’une certaine liberté d’émigrer (surtout des étudiants) pendant la période du Dégel, des pays de l'Asie et l'Afrique venant en URSS. Le chercheur russe E. Dolgikh (2001) présente le tableau de la migration internationale nette de la population de l’URSS entre les années 1961 à 1990.
La migration internationale nette de la population de lURSS entre les années 1961 à 1990
Les années
Solde migratoire (URSS)
1961-1965
307.8
1966-1970
121.9
1971-1975
- 66.1
1976-1980
- 147.4
1981-1985
- 25.5
1986-1990
- 668.1
E. Dolgikh, Lémigration de la Russie, source : www.scepsis.ru

La mort de Staline a mis la fin aux déportations massives, mais le système d’organisation des mouvements migratoires lancé sous Staline a été modifié. Pendant la période soviétique, le grand processus migratoire était essentiellement composé de la migration intérieure et toujours déterminé par l’État. C’était plutôt l'industrialisation forcée, pour accélérer l’évolution de l'urbanisation et le développement de régions périphériques, avec le but de transformer le pays agraire en un pays industriel le plus vite possible qui a motivé ces flux migratoires. Des migrations massives étaient nécessaires pour le développement, mais leur contrôle strict était aussi nécessaire pour maintenir le régime politique totalitaire. Pourtant l’autorité craignait le contrôle sur des migrations massives qui présentait un risque de ruiner le système de l’État.
Une autre période de l’émigration des Azerbaïdjanais a été dans les années 1960 et 1980. Pendant cette période, le désir d’émigrer légalement de l'Union soviétique n'est plus considéré comme un crime, mais considéré par les autorités comme une trahison de ses concitoyens. Avant la ratification du Pacte internationale de 1973 sur les droits civils et politique, l'Union soviétique ne reconnaissait pas le droit à émigrer librement et le permis de sortie ne dépendait que de l'attitude des autorités[1].
L’émigration des Azerbaïdjanais à cette époque était essentiellement vers la Turquie et l’Iran. Le départ en Turquie était lié essentiellement avec le travail. Par contre, le deuxième cas avait une caractéristique spécifique. La Révolution iranienne, en renversant l'État impérial de la dynastie Pahlavi en 1979, a transformé l’Iran en République islamique ce qui a engendré la fuite de population vers l’étranger.
Avec la chute du mur de Berlin en 1989 et l’effondrement de l’URSS en 1991, le monde s’en trouve complètement modifié. Ce processus engendre la division de certains états en Europe comme en ex-Yougoslavie et en ex-Tchécoslovaquie, la création de nouvelles zones de conflit et aussi, la proclamation de l’indépendance de certains pays comme l’Azerbaïdjan en octobre 1991. Ces modifications politiques provoquent des mouvements de population. Essentiellement liée avec la sécurité, surtout en raison du conflit arméno-azerbaïdjanais qui a laissé une trace dans l’économie, les hommes émigrent et s’installent dans les pays de la CEI, particulièrement en Russie et en Ukraine, mais aussi en Allemagne, en Israël, et ailleurs. Aujourd’hui, les raisons de l’émigration du peuple azerbaïdjanais sont différentes.


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Bibliographie
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11. Hadjibeyli Timoutchine (1988) Le question du Haut Karabagh. Un point de vue azerbaïdjanais,  Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée, N°48-49, 1988. Le monde musulman à l’épreuve de la frontière. pp.281-290, source : http://www.persee.fr
12.   İbrahimli Xaleddin (1996), La politique d’immigration d’Azerbaïdjan, (1918 - 1991), Bakou, Elm.
13.   LOIKO Sergei (2001), Russians are leaving the country in droves, Los Angeles Times, 14. 11. 2011.
14.   Rizvan Nazim (2002), D’histoire de la diaspora d’Azerbaïdjan, Bakou, Borçalı HPM.
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16.   Tahirli Abid (2007), La littérature azerbaïdjanaise à l’émigration (1921-1991), Bakou, Çinar Çap.
17.   Sadykova Bakhyt (2007) Mustafa Tchokay dans le mouvement prométhéen, Paris, IFEAC – Harmattan.
18.   Valikhanli Naila (2007), L’histoire d’Azerbaïdjan IIème volume, Bakou, Elm.
19.   Vichnevski Anatoli, Zayontchkovskaia Jeanne (1991), L'émigration de l'ex-Union soviétique : prémices et inconnues, in : Revue européenne de migrations internationales, vol. 7 N° 3, p. 41-66.


Dr. Vazeh ASGAROV




[1] Otkaznik (en russe : отказник) était le terme officieux désignant les personnes à qui le visa d'émigration était refusé par les autorités de l’Union soviétique,  principalement (mais pas uniquement) des Juifs soviétiques. Natan Sharansky était en 1976, l'un des fondateurs et le porte-parole du mouvement refuznik.  

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