La naissance de l'école de CHICAGO
La sociologie moderne se détache des modes de pensée précédente des années 1920. Elle n’est ainsi pas en mesure de pratiquer à l’égard d’un lointain passé leur discipline et les oeuvres de leurs précurseurs. Il faut aussi noter que pendant un certain moment les travaux de sociologues n’étaient pas stables. Surtout entre les deux guerres, à partir des années trente, ces ouvrages restaient ignorés. Pourtant, cette indifférence relative et ce désintérêt partiel sont compensés pour une tendance contemporaine à la relecture des oeuvres fondatrices et par l’usage des concepts centraux de la sociologie de cette période.
La sociologie de l’immigration distingue traditionnellement deux problématiques: celle de l’immigration et celle de l’installation des immigrés. La première étape traditionnelle étudie les causes et les origines de l’immigration, le déplacement jusqu’à l’arrivée dans le pays d’accueil. La deuxième étape traditionnelle de l’immigration se concentre sur l’intégration, l’acquisition d’une position sociale, économique ou politique, dans le pays d’accueil. Les recherches de l’École de Chicago produites entre 1910-1940 constituent les textes fondateurs de la sociologie de l’immigration conduite par des enseignants et des étudiants de l’Université de Chicago. La sociologie de Chicago se caractérise avant tout par sa recherche empirique. Au début, les recherches étaient orientées vers des enquêtes sociales. L’École de Chicago développe des méthodes originales de recherche en utilisant les documents personnels, travail sur les terrains systématiques et diverses sources documentaires en faisant une sociologie quantitative (Coulon, 2004).
Occupant la troisième place des États-Unis par sa population, largement accrue à la fin du XIXème siècle par l’arrivée en masse de migrants américains et d’immigrants étrangers, la ville de Chicago devient une cité industrielle, un centre de commerce et une bourse prospère. Elle est, en effet, l’une des villes des États-Unis qui connaissent le développement le plus rapide dans la deuxième moitié du XIXème siècle. Les facteurs de ce développement sont multiples : la ville est un lieu d’implantation des industries liées à l’agriculture des plaines du Middle West avec des abattoirs et des fabriques d’instruments agricoles. Un des principaux fabricants de wagons, la société Pullman, s’installe à Chicago. Elle est le siège d’importantes industries sidérurgiques, d’imprimerie, de textiles et de traitements de cuir. Par ces emplois, la ville attire une masse d’immigrants venus par vagues successives de toutes les parties de l’Europe: Allemagne, Irlande, Suède, Pologne, Russie, Slovaquie, Italie, Lituanie et République tchèque. Si en 1840, sa population est de 4500 habitants, en 1870 elle atteint 300 000 habitants, 500 000 en 1880, 1 700 000 en 1900, 2 700 000 en 1920. Vers l'année 1900, environ la moitié des habitants de Chicago sont nés à l’étranger (Guth, 2004).
Au cours de son développement, la ville, périodiquement agitée par des conflits sociaux opposant les immigrants les plus récemment arrivés sur les conditions de travail et de rémunération, est devenue une agglomération cosmopolite.
Chicago était l’une des villes oùles classes moyennes devaient affronter les problèmes urbains comme la pauvreté chronique d’un Fraction importante de la population. La définition de ces problèmes urbains est en relation dialectique avec le développement de différents mouvements sociaux, comme ceux du mouvement ouvrier et de réforme qui amène aux affrontements entre employeurs et ouvriers et enfin à des grèves qui sont très fréquentes à Chicago à cette époque-là. Par exemple, entre 1893-1894, une baisse des salaires entraîne une longue grève des ouvriers de l’usine de constructeur de matériel de chemin de fer Pullman, implanté dans le sud de la ville (Coulon, 2004).
Les changements structurels économiques et démographiques s’accompagnent de changements sociaux. Le statut social tient de plus en plus à la compétence acquise. Cela veut dire que la transformation des fondements de l’ordre social était plus apparente que réelle. Dans l’ensemble de la population, la conjonction du talent, de la formation et de la situation sociale n’était pas équilibrée.
En 1889, la fille d’un sénateur Quaker, Jane Addams, diplômée en 1881 d’un établissement d’enseignement supérieur féminin, s’installe dans Hull Hause, l’un des quartiers pauvres de Chicago. Étant un peu moins élitiste que ses prédécesseurs britanniques, elle propose d’offrir avec son ancien collègue des services sociaux et culturels, ainsi qu’un lieu de rencontre et de réunion aux immigrants. Durant les années suivantes, Hull Hause devient le centre d’activités variées et culturelles et provoque chez les nombreuses jeunes femmes l’envie de poursuivre leurs études à l’Université de Chicago.
La nouvelle Université ouvre ses portes en octobre 1892, grâce à la générosité de John Rockefeller qui n’a pas fait d’études supérieures. À l’issue d’une longue négociation, il propose 1 million de dollars à condition de trouver d’autres donateurs. Pendant les vingt premières années d’existence de l’Université, Rockefeller y consacrera 35 millions de dollars de sa fortune. Parmi les donateurs, on trouve le nom de Marshall Field, le propriétaire d’un des grands magasins de la ville, ainsi que des Juifs d’origine allemande1.
Le président de l’Université, William Harper (1856–1906) s’engage à élargir le champ d’action de l’Université et demande à Albion Small (1854-1926) de fonder et diriger le nouveau département d’Anthropologie et de Sociologie qui jouera un rôle important dans le mouvement de réforme des services sociaux de Chicago.
La première école de Chicago s’achève avec la Seconde Guerre mondiale au moment où la sociologie américaine est devenue plus quantitative et plus diverse sur le plan théorique.
L’étude de l’installation des migrants constitue l’un des objets fondateurs de la sociologie américaine, oùla sociologie de l’immigration n’a jamais été considérée comme un sujet mineur. Les chercheurs américains, utilisant la ville de Chicago comme un laboratoire social, prennent les relations ethniques et raciales comme objet d’étude. L’École de Chicago constitue une entreprise scientifique et militante avec la composition des travaux de ses trois fondateurs, Robert Park, Ernest Burgess et William Thomas et aussi les 78 thèses produites entre 1919 et 1935 (Coulon, 2004).
1. http://www.uchicago.edu/about/history.shtml
Bibliographie.
1.ASGAROV Vazeh (2014), L'immigration des Azerbaïdjanais, PAF, 424 p.
http://www.amazon.fr/Limmigration-Azerba%C3%AFdjanais-g%C3%A9n%C3%A9rale-histoire-perspectives/dp/3841622224
2. COULON Alain (2004), L’école de Chicago, Que sais-je ? Paris, Presses universitaires de France.
3. GUTH Suzie (2004), Chicago 1920. Aux origines de la sociologie qualitative, Paris, Tétraèdre.
VAZEH
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire