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mardi 14 août 2018


Les premiers étudiants azerbaïdjanais en Europe durant la période de la République Démocratique d’Azerbaïdjan
Au milieu du XIXème siècle, pour faire suite à la conquête de lAzerbaïdjan du Nord, le gouvernement russe sentait la nécessité d'introduire un nouveau système d'enseignement public, ce qui aurait assuré la formation de fonctionnaires pour soutenir la politique et la situation économique dans la province. Le Seminaria (Séminaire) Transcaucasien de Géorgie était un grand centre de la formation des pédagogues. À la fin du XIXème siècle, les jeunes (uniquement des garçons) azerbaïdjanais des familles les plus riches continuaient leurs études dans les établissements supérieurs de Tbilissi, Gori, Saint-Pétersbourg ainsi que d’autres régions de Russie. Parallèlement, certains choisissaient les universités européennes pour poursuivre leurs études comme Rachid Bey Akhoundov, Ahmed Ağaoğlu, Mohsum Khanlarov, Mohammed Aga Schahtakhtinsky. Au XXème siècle, il y a eu quelques envois de jeunes étudiants azerbaïdjanais à létranger : pendant lépoque de la RDA, dans les années 1970 (surtout dans les établissements de lUnion soviétique) et après 1991. Cette pratique a débuté pendant lépoque de la RDA et le destin de la plupart de ces étudiants de cette époque reste toujours inconnu (annexe 378-392).
Le groupe des étudiants azerbaïdjanais arrivés à Paris

  Source : Ismayilov Mahmud, Maksvell Nigar (2008) Azərbaycan tarixi VII cilddə, 1900-1920-ci illər (Lhistoire de lAzerbaïdjan du 1900 au 1920, en 7 volumes), Bakı, Elm, p. 576.
Avec la déclaration de la République Démocratique dAzerbaïdjan, léducation populaire a é favorisée. Dès le premier jour a été créé le Ministère de l'Education Publique (Xalq Maarifi Nazirliyi). Ce ministère était aussi compétent de manière culturelle. L’une de ses tâches les plus importantes était lorganisation de l'enseignement supérieur et la préparation des cadres. Il fut décidé à créer trois écoles supérieures : l’Université d’État de Bakou, le conservatoire d'État et lInstitut dAgriculture. Le 1er septembre 1919 est inaugurée lUniversité dÉtat de Bakou. Le même jour, avec le décret du parlement de la RDA, le ministère de l'Education Publique prit en charge lenvoi de 100 étudiants azerbaïdjanais dans les écoles supérieures les plus prestigieuses du monde pour lannée universitaire 1919-1920 (annaxe, p. 378 à 392). Le Parlement de la République décide d’accorder 7 millions de manats du Trésor public à la disposition du ministère. Il est attribué aux futurs étudiants européens une bourse de 400 francs mensuels et de 1000 francs pour le voyage. Pour les étudiants envoyés aux établissements supérieurs de la Russie, le montant de la bourse était ainsi 3000 roubles et 1000 manats. Pour sélectionner les étudiants, au sein du même ministère fut créé un jury composé de M. E. Rasoulzade, E. Pepinov, G. Garabeyli, M. Hadjinski, A. Efendizade. Ce jury décida l’envoi de 45 étudiants en France, de 23 étudiants en Italie, de 10 étudiants en Angleterre, de 9 étudiants en Turquie et de 13 étudiants en Russie. Mais le ministère déclara l’envoi des étudiants selon une répartition différente : 49 en Allemagne, 27 en France, 4 en Italie, 1 en Angleterre et 6 en Turquie. À cause de la guerre civile en Russie, les 13 étudiants sélectionnés ne seront pas envoyés (Mahmudov, 2005 : 15).
Le 14 janvier 1920, les étudiants, accompagnés par leurs parents, les membres du Parlement, des hommes d’affaires, des personnalités religieuses ainsi que par des représentants publics ont é envoyé tous solennellement à Paris. Leur voyage dura presque 1 mois. Passant par Tbilissi, Istanbul et Rome, les 78 futurs étudiants arrivèrent le 11 février à Paris et s’installèrent dans les hôtels de Belmont et Iéna. Avant de partir dans les pays différents, les étudiants prennent une photo souvenir. Plus tard, cette photo historique sera confiée à R. Aboutalibov par Mamed bey Meherremov, le membre le plus jeune de la délégation envoyée à la conférence de paix de Versailles.

                                Les étudiants azerbaïdjanais de Paris


      Source : Ismayilov Mahmud, Maksvell Nigar (2008) Azərbaycan tarixi VII cilddə, 1900-1920-ci illər (Lhistoire de lAzerbaïdjan du 1900 au 1920, en 7 volumes), Bakı, Elm, p. 13.

Durant six mois, ils recevront leurs bourses d’études. Par contre, avec loccupation de lAzerbaïdjan par les Bolchéviks, la situation du pays changea radicalement. Les étudiants ne recevant plus régulièrement la bourse sadressèrent à Nariman Narimanov, président du Parti Communiste d'Azerbaïdjan. Sous linitiative personnelle de N. Narimanov, le 9 août 1920, fut organisée une réunion. Le comité décida de rétablir la bourse et d’aider les étudiants à l’étranger pour quils poursuivent leurs études. Le 18 juin 1921, N. Narimanov chargea Bahram Akhoundov qui sétait engagé à s’occuper depuis 1919 des affaires des étudiants à létranger d’enquêter sur leurs situations en Europe. B. Akhoundov, entre octobre 1921 et janvier 1922, sera en mission dans les capitales des pays européens pour apprécier la situation financière des étudiants. À son retour, il précise dans son rapport les activités de 28 étudiants en France, de 49 étudiants en Allemagne et de 3 étudiants en Italie. Le 22 mars 1922, N. Narimanov ordonna de créer toutes les possibilités pour que les étudiants poursuivent leurs études. Par contre, à la fin de lannée 1922, avec le départ de N. Narimanov à Moscou au comité régional du Parti Communiste de Transcaucasie, la situation des étudiants changea. À cette période, comme le souligne R. Aboutalibov, les étudiants sont divisés en deux parties fidèles et infidèles. En plus, c’était une période où lAzerbaïdjan avait besoin des personnes qualifiées. Dans une lettre de B. Akhoundov envoyée à D. Hadjibeyli, nous lisons :… l’absence de Nariman a tout changé par rapport aux étudiants, qu'est-ce qui va se passer, on ne sait rien; je ne les oublie pas et je noublierais jamais, au retour à Bakou je moccuperai d’eux, nous avons besoin d’eux, seulement qu’ils étudient (Aboutalibov, 2006 : 71-72).
Jusquà aujourdhui, nous n’avons toujours pas dinformation sur ces 73 étudiants envoyés à létranger en 1920. Au contraire, nous savons que la plupart des étudiants pour survivre ont é obligés de travailler dans les conditions difficiles. Certains se sont trouvés en prison comme Chikhzamanov et Ismail Aliyev à cause de leurs dettes, d’autres ont fini par se suicider. Une petite partie d’entre eux a terminé ses études difficilement et est retournée en Azerbaïdjan. Bientôt, on entendra leurs noms parmi les victimes de la Terreur rouge.
Dans des lettres des étudiants étrangers envoyées à Djeyhoun bey Hadjibeyli, on témoigne l’inquiétude de B. Akhoundov. Nous en présentons quelques-unes :
La lettre dAjdar bey Akhoundov,

Cher Djeyhoun bey,
Je narrive pas à vous exprimer ma sincère gratitude pour votre attention fraternelle envers moi à un moment si difficile
Je suis installé chez la famille daccueil il y a dé 2 mois. Mais, jusqu’au 1er juin j’ai travaillé à Paris, le travail était facile et je lai supporté plus au moins, mais pour l’é ils sont arrivés ici (Dinard ville touristique de la France) à leur résidence privée et mon travail a é multiplié pour 10, je suis obligé de me réveiller à 6 heures du matin et daller en ville pour chercher du lait.

        Au retour à la maison, à 8 h 30, c'est la suite du travail qui commence, le ménage de lappartement de 14 pièces, à peine fini, je le jure, les pieds tremblent de fatigue et de faiblesse, et en outre je dois aider à la cuisine, mais cela est plus que le cauchemar… Quelle saleté ! Dans cette circonstance il faut rester jusqu’aux 10 h 30 du soir.

Excusez-moi, pour lamour de Dieu, parce que je pleure maintenant et narrive pas continuer à écrire…

Pour l'amour de Dieu, aidez-moi, j’ai peur quà cause de frayeurs je devienne fou…
Restant votre fidèle Ajdar bey
La lettre dAbdoul-Houseyn Dadashov de lAllemagne,

Cher Djeyhoun bey,
…le gouvernement exclut de la liste quelques étudiants ; je suis parmi eux. La raison était les amis d’ici, dont l’opinion ne correspondait pas à mon point de vue
Cordialement votre Abdoul-Houseyn.
La lettre de lun des étudiants de lAllemagne, Teymur Aslanov, explique bien comment le destin des étudiants est résolu à Bakou.

Certainement, vous êtes au courant des affaires étudiantes actuelles. J’ajoute pour information que je suis exclu de la liste des boursiers. Dans la réunion de la commission spéciale à Bakou, il a é signalé par une personne que je me trouve très proche du cercle des activistes et que je transfère des informations immédiatement et ponctuellement sur tous à Constantinople.

Cordialement votre Teymur (Aboutalibov, 2006 : 72-73)[1].



Miri bəy zirov, İskəndər Rzazadə, Mustafa bəy Vəkilov (Paris, 1920)[2]

Les étudiants azerbaïdjanais en France, 20 mai 1920



                                                                VAZEH ASGAROV


[1] Dans lannexe (310-324) nous présentons linformation sur ses 100 étudiants. Notons que pendant la recherche nous avons trouvé des informations différentes concernant le lieu détude, le retour ainsi que sur le destin final de ses étudiants.

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